VENISE PROVENÇALE
Martigues, Ô Martigues !
Que ne t’ai-je regardé plus souvent pointer de tes trois doigts les flots bleus qui te fendent, te défendent et nous tendent les bras ? C’est sur ton plan d’eau tranquille, où se reflètent les plats-bords des trois barques de Marius, Fanny et César, que les crépis des murs surgis de la palette, scintillent dans l’âme de notre belle Provence.
Juchée sur la colline, Notre Dame des Marins veille jour et nuit sur les intrépides villas qui ne craignent point de voir s’embraser comme fétus de paille, les pins gorgés de résine, entre lesquels elles ont poussé. Alors ?
.....Alors, qu’importe le vertigineux ouvrage autoroutier qui enjambe la ville, qu’importe les superstructures géantes s’éparpillant sans limite, puisque le paysage traditionnel, persiste.
…Une odeur de thym par ici, une myriade d’abeilles gorgées de lavande, par là. Plus loin, des verres de petit jaune qui se choquent, s’entrechoquent, sans oublier l’aubade concertante de notre accent, glorieux héritage de nos aînés, Marcel Pagnol, Frédéric Mistral ou encore Jean Giono et Paul Arène. Que Monsieur Fernandel se rassure, la lignée n’est pas prête de s’étioler ! Dans son souffle, le mistral n’emportera jamais, ni nos rires, ni nos galéjades, ni davantage notre berceau de légendes.
Notre ville ? Son haleine sent bon la bouillabaisse, sa bouche est aillée, ses lèvres ourlées de poutargue et sa voix chante comme les cigales : elle respire « lou misträou ». Elle est généreuse comme une vraie marseillaise, une vraie femme. Parole de « matégäou. »
J’ai ouï dire que dans l’air, la pollution demeure, que dans nos étangs, les poissons se meurent. Peuchère !!! Pareillement, j’ai appris qu’un joli petit pont succédait à la passerelle d’antan. « Boü Dïoü ! » Ils n’ont pas dû être contents les anciens martégäoux ! Pourtant, il semblerait que sa couleur bleu se marie divinement bien avec les flots ! Mais tout cela, c’était hier...
Aujourd’hui, je vous observe, je vous écoute : toi la nouvelliste, et vous tous, mes amis poètes, amis de plume. Dans le confort de mon ailleurs, jouissant de vos aises, je me laisse bercer par le doux ronronnement de votre plume. Je me sens bien. Je ne suis plus seul. Ce soir, lorsque je baisserai les paupières, grâce à vous, grâce à vous tous, je me blottirai dans l’âme de Martigues et les bras de ma jeunesse. Viendront ensuite les souvenirs que vous aurez réveillés et qui guidèrent vos pas jusqu’à moi.
Merci pour votre distribution de sourires, merci pour votre goût du partage, merci encore pour votre penchant des mots. Fasse qu’un jour, ce que vous représentez engendre une gigantesque farandole autour du monde, sans que jamais ne se desserrent, ni vos mains, ni ce lien qui vous unit, l’écriture, car sans vous, nul doute, l’oubli serait mon lot : Je suis votre cher Passé.